#4 Eugène Veyssière, le petit pâtre

Le Vaulmier constitue, avec Saint-Vincent de Salers et Le Falgoux, l'une des trois communes se trouvant au coeur de la Vallée du Mars (Cantal). Cette vallée escarpée tient son nom de la rivière qui coule en son milieu, le Mars, nom qui aurait un lien avec le dieu romain de la guerre. Cet article de l'Auvergnat de Paris raconte un évènement tragique ayant eu lieu au Vaulmier le  28 octobre 1935: la mort accidentelle du jeune Eugène Veyssière, un petit berger de 11 ans, emporté par les eaux glaciales de la rivière Mars en furie. 

Eugène Veyssière a vu le jour le 29 août 1924 au lieu-dit d' Espinouze où son père Jean-Marie (frère de mon arrière-grand-père Gabriel) est cultivateur. Son épouse Angeline Vigier a donné la vie à neuf enfants. Huit sont encore en vie en 1935. Élève à l'école du village, sous la férule de M. Amédée Peythieu, Eugène est également en âge de travailler à la ferme de son père. Il est chargé de garder le troupeau de moutons qui paît sur les pentes herbeuses de la vallée, le long de la rivière qui est toujours à un niveau très haut à cette époque de l'année. Ce 28 octobre, le jeune pâtre doit affronter les éléments déchaînés pour garder son troupeau : le temps est épouvantable et le Mars rugit en contrebas. 

Eugène a-t-il tenté de franchir la rivière grondante pour récupérer un mouton qui s'était sauvé ? Toujours est-il qu'il tombe à l'eau et est emporté par le torrent. On ne peut qu'imaginer l'angoisse de sa famille ne le voyant pas revenir, les recherches qui s'organisent malgré le mauvais temps. Le petit corps ne sera retrouvé que deux jours plus tard. La commune est sous le choc. 

Pierre-Marie Lemmet, qui est l'adjoint du maire Antoine Mathieu, s'acquitte de la lourde tâche de déclarer le décès. On imagine son émoi, car son fils Jean avait le même âge qu' Eugène, ils étaient camarades de classe. 

Le jour de la Toussaint, tout le village est réuni pour un dernier hommage.  L'instituteur Peythieu prononce un émouvant discours et, après la messe de funérailles, les écoliers du village, portant des gerbes blanches, accompagnent à sa dernière demeure le petit cercueil de leur camarade. 

À Espinouze, la vie reprend tant bien que mal son cours. Le travail n'attend pas et il faut de nouveau s'atteler à la tâche. L'automne et l'hiver passent. Au printemps 1936, Jean-Marie, le père d' Eugène, meurt à son domicile d' Espinouze. Il ne s'est sans doute jamais remis de la mort cruelle de son petit pâtre.