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Sa nièce pour épouse

houelse


Le 6 août 1859, on célébra à Paris le mariage d' Antoine Ducher et Anne Borderie. Un mariage aux apparences banales, entre deux jeunes auvergnats immigrés à Paris et originaires du même village du Cantal. La cérémonie eut lieu en l'église Sainte-Marguerite, rue Saint-Bernard dans l'ancien huitième arrondissement ( actuel onzième). Antoine Ducher, ferrailleur domicilié 47 rue de Lappe, était le frère de mon aïeul Jean Ducher. Né à Saint-Vincent de Salers le 2 octobre 1829, il vit le jour au hameau de Colture, sur la propriété d'Antoine Ducher (1774-1836) et Anne Mathieu (1787-1871), dont il est le neuvième et dernier enfant. Il quitta son village, comme beaucoup de ses voisins, pour tenter sa chance dans la capitale.


L'église Sainte-Marguerite, où fut célébré le mariage de l'oncle et de la nièce
L'église Sainte-Marguerite, où fut célébré le mariage de l'oncle et de la nièce

Anne Borderie est également venue au monde à Saint-Vincent, le 10 août 1836. Ses parents, Antoine Borderie (1805-1857) et Françoise Ducher ( née en 1813) sont ensuite montés dans la capitale où son père exerça la profession de voiturier. Couturière demeurant rue de Charonne, elle est la fille unique du couple. Et, plus étonnant, elle est aussi la nièce du marié!  En cet été 1859, Antoine Ducher prend donc sa nièce pour épouse. 

Qu'est-ce qui a pu pousser Anne à épouser son oncle ? L'état civil nous apporte peu de précisions à ce sujet, il est impossible de dire si un contrat de mariage a été fait: les archives de Paris antérieures à 1860 ont été brûlées en 1871 par les communards, nous ne disposons que de l'état civil reconstitué, qui contient peu de détails. 

Anne, fille unique, s'est retrouvée orpheline de père deux ans auparavant. On peut imaginer que la famille était modeste et s'est alors retrouvée avec peu de ressources, obligeant la veuve et sa fille à travailler. Près d'eux vivait cet oncle, dont ils étaient sûrement proches. Encore jeune - il n'a que sept ans de plus que sa nièce - Antoine Ducher travaille comme ferrailleur, un métier qui commence, on l'imagine, à lui rapporter de l'argent et lui permettra une certaine aisance financière. Ainsi un arrangement fut fait. 


Un an plus tard, c'est à Saint-Vincent que naît, le 28 août, le premier enfant du couple. Anne réside provisoirement au village de Colture, non loin de la ferme de sa grand-mère Anne Mathieu, qui est également sa belle-mère. Elle  reste sûrement chez son oncle Antoine Borderie, qui dès le lendemain descend au bourg pour présenter au maire le nourrisson dont il déclare la naissance : c'est un garçon qui sera nommé Antoine comme son père, comme ses oncles, comme son défunt grand-père paternel. On le surnommera Antonin. Antoine Ducher est ensuite rejoint par sa femme et son fils en leur appartement du 29 rue Sainte-Marguerite, dans le onzième arrondissement.

La famille déménage quelques années plus tard, au 24 boulevard Louis-Philippe, où voit le jour leur fille Antoinette-Marie, le 23 juillet 1867. Antoine est accompagné par son frère aîné Antoine - étrangement appelé Jean- qui est aussi ferrailleur et vit rue de Lappe avec sa femme et ses fils. 


Le 29 janvier 1876, Françoise Ducher, belle-mère - et soeur- d'Antoine, meurt à son domicile de la rue de Charonne, et est inhumée quelques jours plus tard au cimetière du Père-Lachaise. La famille retourne vivre rue Sainte-Marguerite, au numéro 39. 

Le 27 février 1877, un nouveau drame frappe la famille : l'aîné, Antonin, décède au domicile de ses parents, à seulement seize ans. Le père fait la déclaration le lendemain, accompagné de son neveu Julien Tible, qui est marchand d'outils rue de Lappe. La mère, elle, ne se remettra sans doute pas de la disparition de son fils : elle meurt à son tour, le  15 février 1878. Julien Tible soutient une fois de plus son oncle. Antoine Ducher se retrouve alors seul avec sa fille de onze ans. 


La jeune fille fait une bonne scolarité, et suit des études d'institutrice: c'est le métier qu'elle exerce en 1889, année de son mariage avec Victor Tripogney, comptable à Paris. Antoine Ducher n'assiste pas au mariage de sa fille unique, il a délaissé son métier de ferrailleur et la capitale pour retourner vivre à Saint-Vincent où il est cultivateur. Les témoins du côté de l'épouse sont son cousin Antoine Tible ( frère de Julien) et Jules Lhomme, époux de sa cousine Anne Dufayet, qui est également institutrice, chez qui elle est domiciliée.


Le couple s'installe rue Saint-Maur, et aura la douleur de rester sans descendance après avoir eu deux enfants mort-nés en 1890 et 1892. Ces tristes événements ont-ils eu raison de la santé mentale de Victor ? Interné, il décède le 12 décembre 1901 à l'hôpital psychiatrique Maison-Blanche de Neuilly-sur-Marne. 

Le 19 janvier 1907, Antoine Ducher est présent au second mariage d'Antoinette: il est revenu à Paris, où il vit de ses rentes. Il consent au remariage de sa fille avec Jean Leturnier, employé de commerce de soixante-trois ans natif de Nantes et deux fois veuf. L'épouse a de nouveau pour témoins Jules Lhomme et Jean (Julien?) Tible. 


Antoine Ducher, le ferrailleur qui s'était marié avec sa nièce, passe les dernières années de sa vie dans son appartement du 4 impasse Truillot. Il a déjà quatre-vingt-cinq ans lorsqu'éclate la première guerre mondiale. Il s'éteint à l'hôpital Tenon le 16 janvier 1915. Son arrière-petite-nièce, ma grand-mère, naît à Saint-Vincent une semaine plus tard. 

Antoinette Leturnier, qui était toujours institutrice à Paris, ne verra pas la fin de la guerre: elle s'est éteinte à son domicile de l'avenue Parmentier le 28 septembre 1918. Elle n'a jamais eu d'autre enfant.

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